10 conseils du pape François pour faire le bon choix
Comment, dans sa vie de tous les jours, faire le bon choix et prendre une juste décision ? En bon jésuite, le pape François répond en puisant dans le trésor de la spiritualité ignatienne. Il offre 10 clés pour aider à discerner.
Du 31 août 2022 au 4 janvier 2023, le pape François a consacré quatorze audiences publiques à une catéchèse sur le discernement, l’art de faire le bon choix. Sa réflexion sur le discernement s’appuie sur l’expérience de saint Ignace de Loyola (1491-1556), auteur des Exercices spirituels et fondateur de l’ordre des jésuites, auquel appartient François.
« Le discernement, dit le pape, se présente comme un exercice d’intelligence, de finesse mais aussi de volonté, pour saisir le moment favorable : ce sont les conditions requises pour faire un bon choix dans des situations inattendues, où il est important et urgent de prendre une décision. » (1)
1. Prier Dieu avec simplicité et familiarité
« La prière est une aide indispensable au discernement spirituel » qui permet de « s’adresser à Dieu avec simplicité et familiarité, comme on parle à un ami, dit le pape François. C’est « entrer dans l’intimité avec le Seigneur, avec une spontanéité affectueuse. »
Pas besoin de grandes paroles, ni de réciter des prières « comme un perroquet », notre prière peut être simple comme un sourire ou un bonjour.
Un signe ne trompe pas : « Quand je rencontre le Seigneur dans la prière, je deviens joyeux. (…) La tristesse, ou la peur, en revanche, sont des signes d’éloignement de Lui Dieu » (3) .
2. Se connaître soi-même
Pour faire le bon choix, encore faut-il bien se connaître. « Cela implique nos facultés humaines : la mémoire, l’intellect, la volonté, l’affectivité. » (4) À nous de prêter attention à « notre façon de faire », aux « sentiments qui nous habitent », aux « pensées récurrentes qui nous conditionnent, souvent à notre insu. »
Comment y parvenir ? En relevant, en fin de journée, « le parcours des sentiments » : « Que s’est-il passé dans mon cœur aujourd’hui ? (…) Qu’est-ce qui m’a fait réagir ? Qu’est-ce qui m’a rendu triste ? Qu’est-ce qui m’a rendu joyeux ? Qu’est-ce qui était mauvais et ai-je fait du mal aux autres ? »
Il n’est pas toujours aisé d’y arriver seul. François recommande l’accompagnement spirituel, qui aide à « démasquer les équivoques, même graves, dans la considération que nous avons de nous-mêmes et dans la relation avec le Seigneur. Cela met en lumière les pensées négatives qui nous habitent, de sorte que nous pouvons nous sentir aimés par le Seigneur, capables de faire de bonnes choses pour Lui. ».
3. Feuilleter le livre de sa propre vie
« Notre vie est le “livre” le plus précieux qui nous ait été donné, un livre que beaucoup ne lisent malheureusement pas, ou le font trop tard, avant de mourir. Et pourtant, c’est précisément dans ce livre que l’on trouve ce que l’on cherche inutilement par d’autres voies », décrit joliment le pape François (5).
Cette façon de lire s’attache au sens des événements. Discerner, c’est aller au-delà de l’action ponctuelle pour la situer dans son contexte plus large : « D’où vient cette pensée ? Ce que je ressens maintenant, d’où cela vient-il ? Où cela me mène-t-il ? (…) Est-ce que c’est quelque chose de nouveau qui me vient maintenant, ou l’ai-je constaté à d’autres moments ? (…) Qu’est-ce que la vie veut me dire à travers cela ? »
Cette façon de faire chasser les « pensées qui nous éloignent de nous-mêmes », et les « messages stéréotypés qui nous font du mal » (tu es nul, rien ne va, tu ne vas pas y arriver).
S’arrêter et reconnaître ce qui nous traverse, dit François, permet aussi de « remarquer les petits miracles que le bon Dieu accomplit pour nous chaque jour », ainsi que « d’autres directions possibles qui renforcent le goût intérieur, la paix et la créativité ».
Le récit des événements de notre vie nous permet également de « saisir des nuances et des détails importants, qui peuvent s’avérer des aides précieuses jusque-là restées cachées. »
4. Écouter son désir profond
Le discernement, explique encore le pape François (6), est « une forme de recherche qui naît toujours de quelque chose qui nous manque. Le désir est une nostalgie de plénitude, un signe de la présence de Dieu en nous. Il évoque une souffrance, une carence, mais en même temps une tension pour atteindre le bien qui manque ». Compris ainsi, notre désir est donc « la boussole pour comprendre où l’on se trouve et où l’on va ». Sachant que, « contrairement à l’envie ou à l’émotion du moment, le désir perdure dans le temps et tend à se concrétiser. »
Pour contacter son désir profond, on peut laisser résonner en soi la question de Jésus à l’aveugle de Jéricho : «Que veux-tu que je fasse pour toi ?” (Mc 10,51). « En dialoguant avec le Seigneur, souligne François, nous apprenons à comprendre ce que nous voulons vraiment dans notre vie. »
5. Reconnaître la consolation authentique
Sur le chemin de la « recherche de notre vrai bien »(7), le croyant sait qu’il se trouve sur la bonne route quand il expérimente la « consolation » qui se manifeste par une paix et une joie durables.
« La consolation spirituelle est une expérience profonde de joie intérieure qui permet de voir la présence de Dieu en toute chose, indique le pape. (…) Ce n’est pas quelque chose qui essaie de forcer notre volonté, ni une euphorie passagère. Elle est liée avant tout avec l’espérance, tournée vers l’avenir. La consolation te pousse à aller de l’avant (…), à faire le premier pas. »
6. Ne pas se laisser tromper par la fausse consolation
Il faut apprendre à distinguer la « fausse consolation», qui se manifeste souvent par un « enthousiasme passager », qui « retombe et disparaît ». Celle-ci laisse « vide » et conduit souvent « au repli sur soi, et au désintérêt pour les autres ».
Le danger, c’est de rechercher la consolation « comme une fin en soi, de manière obsessive, et que nous en oublions le Seigneur ». Le risque serait alors de vivre la relation à Dieu « de manière infantile, en cherchant notre propre intérêt, en essayant de réduire Dieu à un objet pour notre propre usage et notre consommation, en oubliant le plus beau don qui est Dieu Lui-même. »
7. Décrypter l’expérience de désolation
La « désolation », à l’inverse de la consolation, est un état de trouble, d’inquiétude, d’insatisfaction, de tristesse, de découragement… Elle peut être porteuse d’un message caché qui peut nous aider à réajuster notre route. « La tristesse, dit François, joue parfois le rôle d’un feu rouge : « Arrête-toi, arrête-toi ! C’est rouge. Arrête-toi » (8).
Cette « secousse de l’âme » peut devenir une « occasion de croissance » : « Dieu touche le cœur et quelque chose monte en toi, la tristesse, le remords de quelque chose, et c’est une invitation à commencer un chemin. » Pourquoi suis-je triste ? Qu’est-ce qui provoque ma désolation ?
8. Ne pas se laisser décourager
Il faut rester vigilant quand on traverse un état de désolation. « Pour qui (…) a le désir de faire le bien, la tristesse est un obstacle avec lequel le tentateur veut nous décourager ». Dans ce cas, préconise François, il faut agir « de manière exactement contraire à ce qui est suggéré, déterminés à poursuivre ce que l’on s’était proposé de faire (…) » On ne change pas de cap dans la tempête : « Une règle sage dit de ne pas faire de changements quand on est désolé. Ce sera le temps qui suivra, plutôt que l’humeur du moment, qui montrera le bien-fondé ou pas de nos choix. »
9. Reconnaître les signes d’une bonne décision
Après avoir discerné les avantages et les inconvénients de la décision à prendre, prêté attention aux mouvements intérieurs (consolation, désolation), prié, vient le temps de décider (9).
La décision est bonne quand :
→ Elle n’a pas été prise sous l’effet de la « peur « , d’un « chantage affectif » ou d’une « contrainte » ;
→ Elle procure « une paix qui dure dans le temps (..). Une paix qui apporte harmonie, unité, ferveur, zèle » ;
→ Elle donne le sentiment « d’être à sa place dans la vie », dans une grande « tranquillité d’esprit », avec la capacité de pouvoir affronter « les difficultés qui se présentent avec une énergie et une force d’âme renouvelées » ;
→ Elle nous laisse « libre par rapport à ce qui a été décidé, prêt à le remettre en question, voire à y renoncer face à d’éventuels démentis, en essayant d’y trouver un possible enseignement du Seigneur ».
10. Demeurer vigilant
Une fois la décision prise, il faut rester vigilant. Le Christ appelle ses disciples à veiller (Lc 12,35-37). « Ce n’est pas un danger d’ordre psychologique, explique François, mais d’ordre spirituel, un véritable piège de l’esprit mauvais. » (9).
Être vigilant, c’est « surveiller notre cœur et comprendre ce qui se passe à l’intérieur ». C’est « l’attitude ordinaire à adopter dans la conduite de la vie, afin que nos bons choix, effectués parfois après un discernement exigeant, se réalisent avec persévérance et cohérence et portent du fruit ». Car le danger guette celui qui est « trop sûr de lui, a perdu l’humilité de veiller sur son propre cœur », et oublie de compter sur la grâce de Dieu. (10)
Trois moyens s’offrent à nous pour rester vigilant :
→ S’appuyer sur la Bible et l’enseignement de l’Église : il nous aident à « lire ce qui se passe dans nos cœurs, en apprenant à reconnaître la voix de Dieu et à la distinguer des autres voix, qui semblent s’imposer à notre attention ». Le meilleur moyen de l’entendre ? Lire un passage de l’Évangile, cinq minutes par jour, même une minute suffit… « Laissez la Parole de Dieu s’approcher de votre cœur. »
→ Vivre sa relation avec Dieu comme une relation d’amitié. « Il veut que nous soyons amis (…). Quand on en fait l’expérience, le cœur fond et les doutes, les peurs, les sentiments d’indignité s’effacent. Rien ne peut s’opposer à cet amour de la rencontre avec le Seigneur. »
→ Demander « le don de l’Esprit Saint, qui est présent en nous et qui nous instruit, rend vivante la Parole de Dieu que nous lisons, suggère de nouveaux sens, ouvre des portes qui semblaient fermées, indique des chemins de vie là où il ne semblait y avoir que ténèbres et confusion. »
« Le discernement, conclut François, a pour but de reconnaître le salut opéré par le Seigneur dans ma vie, il me rappelle que je ne suis jamais seul et que si je lutte, c’est que l’enjeu est important. L’Esprit Saint est toujours avec nous. »
(1) Catéchèse n° 1. Que signifie discerner ?
(2) Exercices spirituels § 53.
(3) Catéchèse n° 3. La familiarité avec le Seigneur.
(4) Catéchèse n° 4. Se connaître soi-même ; et n°14. L’accompagnement spirituel
(5) Catéchèse n° 6. Le livre de sa propre vie
(6) Catéchèse n° 5. Le désir
(7) Catéchèse n° 9. La consolation ; et n° 10. La consolation authentique.
(8) Catéchèse n° 7. La désolation ; et n°8. Pourquoi sommes-nous désolés ?
(9) Catéchèse n° 11. La confirmation de la bonne décision
(10) Catéchèse n° 12. La vigilance
in La Croix du 22 janvier 2023
Publié le 24 janvier 2023
10 conseils du pape François pour faire le bon choix
Comment, dans sa vie de tous les jours, faire le bon choix et prendre une juste décision ? En bon jésuite, le pape François répond en puisant dans le trésor de la spiritualité ignatienne. Il offre 10 clés pour aider à discerner.
Du 31 août 2022 au 4 janvier 2023, le pape François a consacré quatorze audiences publiques à une catéchèse sur le discernement, l’art de faire le bon choix. Sa réflexion sur le discernement s’appuie sur l’expérience de saint Ignace de Loyola (1491-1556), auteur des Exercices spirituels et fondateur de l’ordre des jésuites, auquel appartient François.
« Le discernement, dit le pape, se présente comme un exercice d’intelligence, de finesse mais aussi de volonté, pour saisir le moment favorable : ce sont les conditions requises pour faire un bon choix dans des situations inattendues, où il est important et urgent de prendre une décision. » (1)
1. Prier Dieu avec simplicité et familiarité
« La prière est une aide indispensable au discernement spirituel » qui permet de « s’adresser à Dieu avec simplicité et familiarité, comme on parle à un ami, dit le pape François. C’est « entrer dans l’intimité avec le Seigneur, avec une spontanéité affectueuse. »
Pas besoin de grandes paroles, ni de réciter des prières « comme un perroquet », notre prière peut être simple comme un sourire ou un bonjour.
Un signe ne trompe pas : « Quand je rencontre le Seigneur dans la prière, je deviens joyeux. (…) La tristesse, ou la peur, en revanche, sont des signes d’éloignement de Lui Dieu » (3) .
2. Se connaître soi-même
Pour faire le bon choix, encore faut-il bien se connaître. « Cela implique nos facultés humaines : la mémoire, l’intellect, la volonté, l’affectivité. » (4) À nous de prêter attention à « notre façon de faire », aux « sentiments qui nous habitent », aux « pensées récurrentes qui nous conditionnent, souvent à notre insu. »
Comment y parvenir ? En relevant, en fin de journée, « le parcours des sentiments » : « Que s’est-il passé dans mon cœur aujourd’hui ? (…) Qu’est-ce qui m’a fait réagir ? Qu’est-ce qui m’a rendu triste ? Qu’est-ce qui m’a rendu joyeux ? Qu’est-ce qui était mauvais et ai-je fait du mal aux autres ? »
Il n’est pas toujours aisé d’y arriver seul. François recommande l’accompagnement spirituel, qui aide à « démasquer les équivoques, même graves, dans la considération que nous avons de nous-mêmes et dans la relation avec le Seigneur. Cela met en lumière les pensées négatives qui nous habitent, de sorte que nous pouvons nous sentir aimés par le Seigneur, capables de faire de bonnes choses pour Lui. ».
3. Feuilleter le livre de sa propre vie
« Notre vie est le “livre” le plus précieux qui nous ait été donné, un livre que beaucoup ne lisent malheureusement pas, ou le font trop tard, avant de mourir. Et pourtant, c’est précisément dans ce livre que l’on trouve ce que l’on cherche inutilement par d’autres voies », décrit joliment le pape François (5).
Cette façon de lire s’attache au sens des événements. Discerner, c’est aller au-delà de l’action ponctuelle pour la situer dans son contexte plus large : « D’où vient cette pensée ? Ce que je ressens maintenant, d’où cela vient-il ? Où cela me mène-t-il ? (…) Est-ce que c’est quelque chose de nouveau qui me vient maintenant, ou l’ai-je constaté à d’autres moments ? (…) Qu’est-ce que la vie veut me dire à travers cela ? »
Cette façon de faire chasser les « pensées qui nous éloignent de nous-mêmes », et les « messages stéréotypés qui nous font du mal » (tu es nul, rien ne va, tu ne vas pas y arriver).
S’arrêter et reconnaître ce qui nous traverse, dit François, permet aussi de « remarquer les petits miracles que le bon Dieu accomplit pour nous chaque jour », ainsi que « d’autres directions possibles qui renforcent le goût intérieur, la paix et la créativité ».
Le récit des événements de notre vie nous permet également de « saisir des nuances et des détails importants, qui peuvent s’avérer des aides précieuses jusque-là restées cachées. »
4. Écouter son désir profond
Le discernement, explique encore le pape François (6), est « une forme de recherche qui naît toujours de quelque chose qui nous manque. Le désir est une nostalgie de plénitude, un signe de la présence de Dieu en nous. Il évoque une souffrance, une carence, mais en même temps une tension pour atteindre le bien qui manque ». Compris ainsi, notre désir est donc « la boussole pour comprendre où l’on se trouve et où l’on va ». Sachant que, « contrairement à l’envie ou à l’émotion du moment, le désir perdure dans le temps et tend à se concrétiser. »
Pour contacter son désir profond, on peut laisser résonner en soi la question de Jésus à l’aveugle de Jéricho : «Que veux-tu que je fasse pour toi ?” (Mc 10,51). « En dialoguant avec le Seigneur, souligne François, nous apprenons à comprendre ce que nous voulons vraiment dans notre vie. »
5. Reconnaître la consolation authentique
Sur le chemin de la « recherche de notre vrai bien »(7), le croyant sait qu’il se trouve sur la bonne route quand il expérimente la « consolation » qui se manifeste par une paix et une joie durables.
« La consolation spirituelle est une expérience profonde de joie intérieure qui permet de voir la présence de Dieu en toute chose, indique le pape. (…) Ce n’est pas quelque chose qui essaie de forcer notre volonté, ni une euphorie passagère. Elle est liée avant tout avec l’espérance, tournée vers l’avenir. La consolation te pousse à aller de l’avant (…), à faire le premier pas. »
6. Ne pas se laisser tromper par la fausse consolation
Il faut apprendre à distinguer la « fausse consolation», qui se manifeste souvent par un « enthousiasme passager », qui « retombe et disparaît ». Celle-ci laisse « vide » et conduit souvent « au repli sur soi, et au désintérêt pour les autres ».
Le danger, c’est de rechercher la consolation « comme une fin en soi, de manière obsessive, et que nous en oublions le Seigneur ». Le risque serait alors de vivre la relation à Dieu « de manière infantile, en cherchant notre propre intérêt, en essayant de réduire Dieu à un objet pour notre propre usage et notre consommation, en oubliant le plus beau don qui est Dieu Lui-même. »
7. Décrypter l’expérience de désolation
La « désolation », à l’inverse de la consolation, est un état de trouble, d’inquiétude, d’insatisfaction, de tristesse, de découragement… Elle peut être porteuse d’un message caché qui peut nous aider à réajuster notre route. « La tristesse, dit François, joue parfois le rôle d’un feu rouge : « Arrête-toi, arrête-toi ! C’est rouge. Arrête-toi » (8).
Cette « secousse de l’âme » peut devenir une « occasion de croissance » : « Dieu touche le cœur et quelque chose monte en toi, la tristesse, le remords de quelque chose, et c’est une invitation à commencer un chemin. » Pourquoi suis-je triste ? Qu’est-ce qui provoque ma désolation ?
8. Ne pas se laisser décourager
Il faut rester vigilant quand on traverse un état de désolation. « Pour qui (…) a le désir de faire le bien, la tristesse est un obstacle avec lequel le tentateur veut nous décourager ». Dans ce cas, préconise François, il faut agir « de manière exactement contraire à ce qui est suggéré, déterminés à poursuivre ce que l’on s’était proposé de faire (…) » On ne change pas de cap dans la tempête : « Une règle sage dit de ne pas faire de changements quand on est désolé. Ce sera le temps qui suivra, plutôt que l’humeur du moment, qui montrera le bien-fondé ou pas de nos choix. »
9. Reconnaître les signes d’une bonne décision
Après avoir discerné les avantages et les inconvénients de la décision à prendre, prêté attention aux mouvements intérieurs (consolation, désolation), prié, vient le temps de décider (9).
La décision est bonne quand :
→ Elle n’a pas été prise sous l’effet de la « peur « , d’un « chantage affectif » ou d’une « contrainte » ;
→ Elle procure « une paix qui dure dans le temps (..). Une paix qui apporte harmonie, unité, ferveur, zèle » ;
→ Elle donne le sentiment « d’être à sa place dans la vie », dans une grande « tranquillité d’esprit », avec la capacité de pouvoir affronter « les difficultés qui se présentent avec une énergie et une force d’âme renouvelées » ;
→ Elle nous laisse « libre par rapport à ce qui a été décidé, prêt à le remettre en question, voire à y renoncer face à d’éventuels démentis, en essayant d’y trouver un possible enseignement du Seigneur ».
10. Demeurer vigilant
Une fois la décision prise, il faut rester vigilant. Le Christ appelle ses disciples à veiller (Lc 12,35-37). « Ce n’est pas un danger d’ordre psychologique, explique François, mais d’ordre spirituel, un véritable piège de l’esprit mauvais. » (9).
Être vigilant, c’est « surveiller notre cœur et comprendre ce qui se passe à l’intérieur ». C’est « l’attitude ordinaire à adopter dans la conduite de la vie, afin que nos bons choix, effectués parfois après un discernement exigeant, se réalisent avec persévérance et cohérence et portent du fruit ». Car le danger guette celui qui est « trop sûr de lui, a perdu l’humilité de veiller sur son propre cœur », et oublie de compter sur la grâce de Dieu. (10)
Trois moyens s’offrent à nous pour rester vigilant :
→ S’appuyer sur la Bible et l’enseignement de l’Église : il nous aident à « lire ce qui se passe dans nos cœurs, en apprenant à reconnaître la voix de Dieu et à la distinguer des autres voix, qui semblent s’imposer à notre attention ». Le meilleur moyen de l’entendre ? Lire un passage de l’Évangile, cinq minutes par jour, même une minute suffit… « Laissez la Parole de Dieu s’approcher de votre cœur. »
→ Vivre sa relation avec Dieu comme une relation d’amitié. « Il veut que nous soyons amis (…). Quand on en fait l’expérience, le cœur fond et les doutes, les peurs, les sentiments d’indignité s’effacent. Rien ne peut s’opposer à cet amour de la rencontre avec le Seigneur. »
→ Demander « le don de l’Esprit Saint, qui est présent en nous et qui nous instruit, rend vivante la Parole de Dieu que nous lisons, suggère de nouveaux sens, ouvre des portes qui semblaient fermées, indique des chemins de vie là où il ne semblait y avoir que ténèbres et confusion. »
« Le discernement, conclut François, a pour but de reconnaître le salut opéré par le Seigneur dans ma vie, il me rappelle que je ne suis jamais seul et que si je lutte, c’est que l’enjeu est important. L’Esprit Saint est toujours avec nous. »
(1) Catéchèse n° 1. Que signifie discerner ?
(2) Exercices spirituels § 53.
(3) Catéchèse n° 3. La familiarité avec le Seigneur.
(4) Catéchèse n° 4. Se connaître soi-même ; et n°14. L’accompagnement spirituel
(5) Catéchèse n° 6. Le livre de sa propre vie
(6) Catéchèse n° 5. Le désir
(7) Catéchèse n° 9. La consolation ; et n° 10. La consolation authentique.
(8) Catéchèse n° 7. La désolation ; et n°8. Pourquoi sommes-nous désolés ?
(9) Catéchèse n° 11. La confirmation de la bonne décision
(10) Catéchèse n° 12. La vigilance
in La Croix du 22 janvier 2023
Publié le 24 janvier 2023
10 conseils du pape François pour faire le bon choix
Comment, dans sa vie de tous les jours, faire le bon choix et prendre une juste décision ? En bon jésuite, le pape François répond en puisant dans le trésor de la spiritualité ignatienne. Il offre 10 clés pour aider à discerner.
Du 31 août 2022 au 4 janvier 2023, le pape François a consacré quatorze audiences publiques à une catéchèse sur le discernement, l’art de faire le bon choix. Sa réflexion sur le discernement s’appuie sur l’expérience de saint Ignace de Loyola (1491-1556), auteur des Exercices spirituels et fondateur de l’ordre des jésuites, auquel appartient François.
« Le discernement, dit le pape, se présente comme un exercice d’intelligence, de finesse mais aussi de volonté, pour saisir le moment favorable : ce sont les conditions requises pour faire un bon choix dans des situations inattendues, où il est important et urgent de prendre une décision. » (1)
1. Prier Dieu avec simplicité et familiarité
« La prière est une aide indispensable au discernement spirituel » qui permet de « s’adresser à Dieu avec simplicité et familiarité, comme on parle à un ami, dit le pape François. C’est « entrer dans l’intimité avec le Seigneur, avec une spontanéité affectueuse. »
Pas besoin de grandes paroles, ni de réciter des prières « comme un perroquet », notre prière peut être simple comme un sourire ou un bonjour.
Un signe ne trompe pas : « Quand je rencontre le Seigneur dans la prière, je deviens joyeux. (…) La tristesse, ou la peur, en revanche, sont des signes d’éloignement de Lui Dieu » (3) .
2. Se connaître soi-même
Pour faire le bon choix, encore faut-il bien se connaître. « Cela implique nos facultés humaines : la mémoire, l’intellect, la volonté, l’affectivité. » (4) À nous de prêter attention à « notre façon de faire », aux « sentiments qui nous habitent », aux « pensées récurrentes qui nous conditionnent, souvent à notre insu. »
Comment y parvenir ? En relevant, en fin de journée, « le parcours des sentiments » : « Que s’est-il passé dans mon cœur aujourd’hui ? (…) Qu’est-ce qui m’a fait réagir ? Qu’est-ce qui m’a rendu triste ? Qu’est-ce qui m’a rendu joyeux ? Qu’est-ce qui était mauvais et ai-je fait du mal aux autres ? »
Il n’est pas toujours aisé d’y arriver seul. François recommande l’accompagnement spirituel, qui aide à « démasquer les équivoques, même graves, dans la considération que nous avons de nous-mêmes et dans la relation avec le Seigneur. Cela met en lumière les pensées négatives qui nous habitent, de sorte que nous pouvons nous sentir aimés par le Seigneur, capables de faire de bonnes choses pour Lui. ».
3. Feuilleter le livre de sa propre vie
« Notre vie est le “livre” le plus précieux qui nous ait été donné, un livre que beaucoup ne lisent malheureusement pas, ou le font trop tard, avant de mourir. Et pourtant, c’est précisément dans ce livre que l’on trouve ce que l’on cherche inutilement par d’autres voies », décrit joliment le pape François (5).
Cette façon de lire s’attache au sens des événements. Discerner, c’est aller au-delà de l’action ponctuelle pour la situer dans son contexte plus large : « D’où vient cette pensée ? Ce que je ressens maintenant, d’où cela vient-il ? Où cela me mène-t-il ? (…) Est-ce que c’est quelque chose de nouveau qui me vient maintenant, ou l’ai-je constaté à d’autres moments ? (…) Qu’est-ce que la vie veut me dire à travers cela ? »
Cette façon de faire chasser les « pensées qui nous éloignent de nous-mêmes », et les « messages stéréotypés qui nous font du mal » (tu es nul, rien ne va, tu ne vas pas y arriver).
S’arrêter et reconnaître ce qui nous traverse, dit François, permet aussi de « remarquer les petits miracles que le bon Dieu accomplit pour nous chaque jour », ainsi que « d’autres directions possibles qui renforcent le goût intérieur, la paix et la créativité ».
Le récit des événements de notre vie nous permet également de « saisir des nuances et des détails importants, qui peuvent s’avérer des aides précieuses jusque-là restées cachées. »
4. Écouter son désir profond
Le discernement, explique encore le pape François (6), est « une forme de recherche qui naît toujours de quelque chose qui nous manque. Le désir est une nostalgie de plénitude, un signe de la présence de Dieu en nous. Il évoque une souffrance, une carence, mais en même temps une tension pour atteindre le bien qui manque ». Compris ainsi, notre désir est donc « la boussole pour comprendre où l’on se trouve et où l’on va ». Sachant que, « contrairement à l’envie ou à l’émotion du moment, le désir perdure dans le temps et tend à se concrétiser. »
Pour contacter son désir profond, on peut laisser résonner en soi la question de Jésus à l’aveugle de Jéricho : «Que veux-tu que je fasse pour toi ?” (Mc 10,51). « En dialoguant avec le Seigneur, souligne François, nous apprenons à comprendre ce que nous voulons vraiment dans notre vie. »
5. Reconnaître la consolation authentique
Sur le chemin de la « recherche de notre vrai bien »(7), le croyant sait qu’il se trouve sur la bonne route quand il expérimente la « consolation » qui se manifeste par une paix et une joie durables.
« La consolation spirituelle est une expérience profonde de joie intérieure qui permet de voir la présence de Dieu en toute chose, indique le pape. (…) Ce n’est pas quelque chose qui essaie de forcer notre volonté, ni une euphorie passagère. Elle est liée avant tout avec l’espérance, tournée vers l’avenir. La consolation te pousse à aller de l’avant (…), à faire le premier pas. »
6. Ne pas se laisser tromper par la fausse consolation
Il faut apprendre à distinguer la « fausse consolation», qui se manifeste souvent par un « enthousiasme passager », qui « retombe et disparaît ». Celle-ci laisse « vide » et conduit souvent « au repli sur soi, et au désintérêt pour les autres ».
Le danger, c’est de rechercher la consolation « comme une fin en soi, de manière obsessive, et que nous en oublions le Seigneur ». Le risque serait alors de vivre la relation à Dieu « de manière infantile, en cherchant notre propre intérêt, en essayant de réduire Dieu à un objet pour notre propre usage et notre consommation, en oubliant le plus beau don qui est Dieu Lui-même. »
7. Décrypter l’expérience de désolation
La « désolation », à l’inverse de la consolation, est un état de trouble, d’inquiétude, d’insatisfaction, de tristesse, de découragement… Elle peut être porteuse d’un message caché qui peut nous aider à réajuster notre route. « La tristesse, dit François, joue parfois le rôle d’un feu rouge : « Arrête-toi, arrête-toi ! C’est rouge. Arrête-toi » (8).
Cette « secousse de l’âme » peut devenir une « occasion de croissance » : « Dieu touche le cœur et quelque chose monte en toi, la tristesse, le remords de quelque chose, et c’est une invitation à commencer un chemin. » Pourquoi suis-je triste ? Qu’est-ce qui provoque ma désolation ?
8. Ne pas se laisser décourager
Il faut rester vigilant quand on traverse un état de désolation. « Pour qui (…) a le désir de faire le bien, la tristesse est un obstacle avec lequel le tentateur veut nous décourager ». Dans ce cas, préconise François, il faut agir « de manière exactement contraire à ce qui est suggéré, déterminés à poursuivre ce que l’on s’était proposé de faire (…) » On ne change pas de cap dans la tempête : « Une règle sage dit de ne pas faire de changements quand on est désolé. Ce sera le temps qui suivra, plutôt que l’humeur du moment, qui montrera le bien-fondé ou pas de nos choix. »
9. Reconnaître les signes d’une bonne décision
Après avoir discerné les avantages et les inconvénients de la décision à prendre, prêté attention aux mouvements intérieurs (consolation, désolation), prié, vient le temps de décider (9).
La décision est bonne quand :
→ Elle n’a pas été prise sous l’effet de la « peur « , d’un « chantage affectif » ou d’une « contrainte » ;
→ Elle procure « une paix qui dure dans le temps (..). Une paix qui apporte harmonie, unité, ferveur, zèle » ;
→ Elle donne le sentiment « d’être à sa place dans la vie », dans une grande « tranquillité d’esprit », avec la capacité de pouvoir affronter « les difficultés qui se présentent avec une énergie et une force d’âme renouvelées » ;
→ Elle nous laisse « libre par rapport à ce qui a été décidé, prêt à le remettre en question, voire à y renoncer face à d’éventuels démentis, en essayant d’y trouver un possible enseignement du Seigneur ».
10. Demeurer vigilant
Une fois la décision prise, il faut rester vigilant. Le Christ appelle ses disciples à veiller (Lc 12,35-37). « Ce n’est pas un danger d’ordre psychologique, explique François, mais d’ordre spirituel, un véritable piège de l’esprit mauvais. » (9).
Être vigilant, c’est « surveiller notre cœur et comprendre ce qui se passe à l’intérieur ». C’est « l’attitude ordinaire à adopter dans la conduite de la vie, afin que nos bons choix, effectués parfois après un discernement exigeant, se réalisent avec persévérance et cohérence et portent du fruit ». Car le danger guette celui qui est « trop sûr de lui, a perdu l’humilité de veiller sur son propre cœur », et oublie de compter sur la grâce de Dieu. (10)
Trois moyens s’offrent à nous pour rester vigilant :
→ S’appuyer sur la Bible et l’enseignement de l’Église : il nous aident à « lire ce qui se passe dans nos cœurs, en apprenant à reconnaître la voix de Dieu et à la distinguer des autres voix, qui semblent s’imposer à notre attention ». Le meilleur moyen de l’entendre ? Lire un passage de l’Évangile, cinq minutes par jour, même une minute suffit… « Laissez la Parole de Dieu s’approcher de votre cœur. »
→ Vivre sa relation avec Dieu comme une relation d’amitié. « Il veut que nous soyons amis (…). Quand on en fait l’expérience, le cœur fond et les doutes, les peurs, les sentiments d’indignité s’effacent. Rien ne peut s’opposer à cet amour de la rencontre avec le Seigneur. »
→ Demander « le don de l’Esprit Saint, qui est présent en nous et qui nous instruit, rend vivante la Parole de Dieu que nous lisons, suggère de nouveaux sens, ouvre des portes qui semblaient fermées, indique des chemins de vie là où il ne semblait y avoir que ténèbres et confusion. »
« Le discernement, conclut François, a pour but de reconnaître le salut opéré par le Seigneur dans ma vie, il me rappelle que je ne suis jamais seul et que si je lutte, c’est que l’enjeu est important. L’Esprit Saint est toujours avec nous. »
(1) Catéchèse n° 1. Que signifie discerner ?
(2) Exercices spirituels § 53.
(3) Catéchèse n° 3. La familiarité avec le Seigneur.
(4) Catéchèse n° 4. Se connaître soi-même ; et n°14. L’accompagnement spirituel
(5) Catéchèse n° 6. Le livre de sa propre vie
(6) Catéchèse n° 5. Le désir
(7) Catéchèse n° 9. La consolation ; et n° 10. La consolation authentique.
(8) Catéchèse n° 7. La désolation ; et n°8. Pourquoi sommes-nous désolés ?
(9) Catéchèse n° 11. La confirmation de la bonne décision
(10) Catéchèse n° 12. La vigilance
in La Croix du 22 janvier 2023
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Publié le 24 janvier 2023