Les Augustins

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Élu pape jeudi 8 mai sous le nom de Léon XIV, Robert Francis Prevost est un religieux augustin. L’ordre de saint Augustin (OSA), ordre mendiant fondé au XIIIe siècle, compte aujourd’hui environ 3 000 membres dans une cinquantaine de pays, principalement en Amérique du Sud, en Asie et en Afrique.

Le futur pape Léon XIV a 18 ans, en 1973, quand il achève ses études secondaires au petit séminaire de l’ordre de saint Augustin (OSA), à Chicago. Il en a 22 quand il entre au noviciat, toujours chez les augustins. À 46 ans, en 2001, le voilà prieur général de l’ordre de saint Augustin, qui est implanté dans une cinquantaine de pays. Sa réélection en vingt minutes, en 2007, pour six autres années, est l’une des plus rapides de l’histoire de cette congrégation.

Il s’agit pourtant d’une histoire longue. Les augustins, dont fait partie Robert Francis Prevost, élu pape jeudi 8 mai à 69 ans, ont été fondés en 1243. Ceux qu’on appelait alors les ermites de saint Augustin rassemblaient initialement plusieurs groupes d’ermites italiens. Depuis le concile Vatican II, ils se nomment tout simplement les augustins.

Ordre mendiant

« Comme les franciscains et les dominicains, les ermites de saint Augustin forment au Moyen Âge un ordre mendiant, dont les membres pouvaient quêter pour assurer leur subsistance », explique le père Benoît Grière, ancien supérieur général des assomptionnistes, une branche plus tardive de la famille augustinienne. L’émergence au XIIIe siècle de ces ordres itinérants, bien différents des ordres traditionnels (les bénédictins, par exemple), est notamment due à l’essor urbain et à la nouvelle donne économique et sociale. Il ne s’agit plus de se retrancher du monde, mais de le rejoindre pour l’évangéliser.

Alors que les règles de saint Basile ou de saint Benoît avaient jusque-là régi la vie monastique, la règle de saint Augustin connaît à cette époque une nouvelle jeunesse. Elle a été édictée au IVe siècle par Augustin d’Hippone, un Romain originaire de l’actuel Maghreb devenu évêque réputé. Sa règle prône un modèle de vie inspiré de celui des premières communautés chrétiennes telles que les décrivent les Actes des Apôtres (4, 32), insistant sur la pauvreté personnelle, la mise en commun des biens et la charité fraternelle.

Le Christ, « Patrie et Voie »

« Ce qui est central dans notre règle, c’est l’amitié fraternelle, basée sur l’humilité : chaque frère doit servir l’autre, se donner pour l’autre », détaille frère Jean Bosco, un augustin du Togo en formation en Belgique. « Le Christ est le monument central, le soubassement de notre vie, ajoute-t-il. Notre vie tourne autour de la connaissance intérieure et intellectuelle du Christ. »

« La spiritualité augustinienne est très christocentrique, confirme le père Benoît Grière. Pour saint Augustin, le Christ est la Patrie et la Voie. » Outre cette place centrale du Christ, qui révèle à tous l’amour gratuit de Dieu, la pensée théologique de saint Augustin se caractérise par l’initiation à l’intériorité et le souci du bien commun. Celui qui a souvent été vu comme « l’inventeur du péché originel » est aussi à l’origine d’une subtile théologie de la grâce, dont l’homme a besoin pour se laisser transformer par Dieu.

Trois siècles après les ermites de saint Augustin, à la fin du XVIe siècle, la famille augustinienne voit naître deux nouveaux ordres mendiants : les augustins récollets, fondé à Tolède, et les augustins déchaux (ou « déchaussés »), en France et en Italie, et ont pour habitude de marcher pieds nus. Suivront, au XIXe siècle, une myriade de congrégations augustiniennes parmi lesquelles les augustins de l’Assomption, aussi appelés « assomptionnistes ». En 1870, ils fondent le groupe de presse Bayard, qui éditeLa Croix.

Sud global

L’ordre de saint Augustin (OSA) compte aujourd’hui environ 3 000 membres dans une cinquantaine de pays. Comme de nombreuses congrégations, son centre de gravité s’est peu à peu déplacé de la vieille Europe vers le Sud global.« Aux Pays-Bas, notamment, plusieurs maisons ont fermé ces dernières années, il y a eu des difficultés de vocations », raconte frère Jean Bosco. En Europe, la congrégation n’est plus guère implantée qu’en Allemagne, en Italie et en Espagne. En France, elle n’a jamais vraiment repris pied après sa suppression lors de la Révolution.

« Les augustins sont également moins nombreux qu’auparavant aux États-Unis et aux Canada, complète le père Benoît Grière. En revanche, ils sont plus dynamiques en Amérique du Sud, en Asie (notamment aux Philippines), en Australie et en Afrique (Kenya, Tanzanie, Nigeria, République démocratique du Congo, etc.). »

« Je suis un fils de saint Augustin, un augustinien », a affirmé le nouveau pape dès sa première apparition au balcon, jeudi 8 mai au soir, citant immédiatement son maître spirituel : « Avec vous, je suis chrétien et pour vous, je suis évêque. » Benoît XVI, déjà, se réclamait de saint Augustin. Il le considérait comme « le plus grand converti de l’histoire de l’Église ».

Publié le 25 mai 2025

Les Augustins

Élu pape jeudi 8 mai sous le nom de Léon XIV, Robert Francis Prevost est un religieux augustin. L’ordre de saint Augustin (OSA), ordre mendiant fondé au XIIIe siècle, compte aujourd’hui environ 3 000 membres dans une cinquantaine de pays, principalement en Amérique du Sud, en Asie et en Afrique.

Le futur pape Léon XIV a 18 ans, en 1973, quand il achève ses études secondaires au petit séminaire de l’ordre de saint Augustin (OSA), à Chicago. Il en a 22 quand il entre au noviciat, toujours chez les augustins. À 46 ans, en 2001, le voilà prieur général de l’ordre de saint Augustin, qui est implanté dans une cinquantaine de pays. Sa réélection en vingt minutes, en 2007, pour six autres années, est l’une des plus rapides de l’histoire de cette congrégation.

Il s’agit pourtant d’une histoire longue. Les augustins, dont fait partie Robert Francis Prevost, élu pape jeudi 8 mai à 69 ans, ont été fondés en 1243. Ceux qu’on appelait alors les ermites de saint Augustin rassemblaient initialement plusieurs groupes d’ermites italiens. Depuis le concile Vatican II, ils se nomment tout simplement les augustins.

Ordre mendiant

« Comme les franciscains et les dominicains, les ermites de saint Augustin forment au Moyen Âge un ordre mendiant, dont les membres pouvaient quêter pour assurer leur subsistance », explique le père Benoît Grière, ancien supérieur général des assomptionnistes, une branche plus tardive de la famille augustinienne. L’émergence au XIIIe siècle de ces ordres itinérants, bien différents des ordres traditionnels (les bénédictins, par exemple), est notamment due à l’essor urbain et à la nouvelle donne économique et sociale. Il ne s’agit plus de se retrancher du monde, mais de le rejoindre pour l’évangéliser.

Alors que les règles de saint Basile ou de saint Benoît avaient jusque-là régi la vie monastique, la règle de saint Augustin connaît à cette époque une nouvelle jeunesse. Elle a été édictée au IVe siècle par Augustin d’Hippone, un Romain originaire de l’actuel Maghreb devenu évêque réputé. Sa règle prône un modèle de vie inspiré de celui des premières communautés chrétiennes telles que les décrivent les Actes des Apôtres (4, 32), insistant sur la pauvreté personnelle, la mise en commun des biens et la charité fraternelle.

Le Christ, « Patrie et Voie »

« Ce qui est central dans notre règle, c’est l’amitié fraternelle, basée sur l’humilité : chaque frère doit servir l’autre, se donner pour l’autre », détaille frère Jean Bosco, un augustin du Togo en formation en Belgique. « Le Christ est le monument central, le soubassement de notre vie, ajoute-t-il. Notre vie tourne autour de la connaissance intérieure et intellectuelle du Christ. »

« La spiritualité augustinienne est très christocentrique, confirme le père Benoît Grière. Pour saint Augustin, le Christ est la Patrie et la Voie. » Outre cette place centrale du Christ, qui révèle à tous l’amour gratuit de Dieu, la pensée théologique de saint Augustin se caractérise par l’initiation à l’intériorité et le souci du bien commun. Celui qui a souvent été vu comme « l’inventeur du péché originel » est aussi à l’origine d’une subtile théologie de la grâce, dont l’homme a besoin pour se laisser transformer par Dieu.

Trois siècles après les ermites de saint Augustin, à la fin du XVIe siècle, la famille augustinienne voit naître deux nouveaux ordres mendiants : les augustins récollets, fondé à Tolède, et les augustins déchaux (ou « déchaussés »), en France et en Italie, et ont pour habitude de marcher pieds nus. Suivront, au XIXe siècle, une myriade de congrégations augustiniennes parmi lesquelles les augustins de l’Assomption, aussi appelés « assomptionnistes ». En 1870, ils fondent le groupe de presse Bayard, qui éditeLa Croix.

Sud global

L’ordre de saint Augustin (OSA) compte aujourd’hui environ 3 000 membres dans une cinquantaine de pays. Comme de nombreuses congrégations, son centre de gravité s’est peu à peu déplacé de la vieille Europe vers le Sud global.« Aux Pays-Bas, notamment, plusieurs maisons ont fermé ces dernières années, il y a eu des difficultés de vocations », raconte frère Jean Bosco. En Europe, la congrégation n’est plus guère implantée qu’en Allemagne, en Italie et en Espagne. En France, elle n’a jamais vraiment repris pied après sa suppression lors de la Révolution.

« Les augustins sont également moins nombreux qu’auparavant aux États-Unis et aux Canada, complète le père Benoît Grière. En revanche, ils sont plus dynamiques en Amérique du Sud, en Asie (notamment aux Philippines), en Australie et en Afrique (Kenya, Tanzanie, Nigeria, République démocratique du Congo, etc.). »

« Je suis un fils de saint Augustin, un augustinien », a affirmé le nouveau pape dès sa première apparition au balcon, jeudi 8 mai au soir, citant immédiatement son maître spirituel : « Avec vous, je suis chrétien et pour vous, je suis évêque. » Benoît XVI, déjà, se réclamait de saint Augustin. Il le considérait comme « le plus grand converti de l’histoire de l’Église ».

Publié le 25 mai 2025

Les Augustins

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Élu pape jeudi 8 mai sous le nom de Léon XIV, Robert Francis Prevost est un religieux augustin. L’ordre de saint Augustin (OSA), ordre mendiant fondé au XIIIe siècle, compte aujourd’hui environ 3 000 membres dans une cinquantaine de pays, principalement en Amérique du Sud, en Asie et en Afrique.

Le futur pape Léon XIV a 18 ans, en 1973, quand il achève ses études secondaires au petit séminaire de l’ordre de saint Augustin (OSA), à Chicago. Il en a 22 quand il entre au noviciat, toujours chez les augustins. À 46 ans, en 2001, le voilà prieur général de l’ordre de saint Augustin, qui est implanté dans une cinquantaine de pays. Sa réélection en vingt minutes, en 2007, pour six autres années, est l’une des plus rapides de l’histoire de cette congrégation.

Il s’agit pourtant d’une histoire longue. Les augustins, dont fait partie Robert Francis Prevost, élu pape jeudi 8 mai à 69 ans, ont été fondés en 1243. Ceux qu’on appelait alors les ermites de saint Augustin rassemblaient initialement plusieurs groupes d’ermites italiens. Depuis le concile Vatican II, ils se nomment tout simplement les augustins.

Ordre mendiant

« Comme les franciscains et les dominicains, les ermites de saint Augustin forment au Moyen Âge un ordre mendiant, dont les membres pouvaient quêter pour assurer leur subsistance », explique le père Benoît Grière, ancien supérieur général des assomptionnistes, une branche plus tardive de la famille augustinienne. L’émergence au XIIIe siècle de ces ordres itinérants, bien différents des ordres traditionnels (les bénédictins, par exemple), est notamment due à l’essor urbain et à la nouvelle donne économique et sociale. Il ne s’agit plus de se retrancher du monde, mais de le rejoindre pour l’évangéliser.

Alors que les règles de saint Basile ou de saint Benoît avaient jusque-là régi la vie monastique, la règle de saint Augustin connaît à cette époque une nouvelle jeunesse. Elle a été édictée au IVe siècle par Augustin d’Hippone, un Romain originaire de l’actuel Maghreb devenu évêque réputé. Sa règle prône un modèle de vie inspiré de celui des premières communautés chrétiennes telles que les décrivent les Actes des Apôtres (4, 32), insistant sur la pauvreté personnelle, la mise en commun des biens et la charité fraternelle.

Le Christ, « Patrie et Voie »

« Ce qui est central dans notre règle, c’est l’amitié fraternelle, basée sur l’humilité : chaque frère doit servir l’autre, se donner pour l’autre », détaille frère Jean Bosco, un augustin du Togo en formation en Belgique. « Le Christ est le monument central, le soubassement de notre vie, ajoute-t-il. Notre vie tourne autour de la connaissance intérieure et intellectuelle du Christ. »

« La spiritualité augustinienne est très christocentrique, confirme le père Benoît Grière. Pour saint Augustin, le Christ est la Patrie et la Voie. » Outre cette place centrale du Christ, qui révèle à tous l’amour gratuit de Dieu, la pensée théologique de saint Augustin se caractérise par l’initiation à l’intériorité et le souci du bien commun. Celui qui a souvent été vu comme « l’inventeur du péché originel » est aussi à l’origine d’une subtile théologie de la grâce, dont l’homme a besoin pour se laisser transformer par Dieu.

Trois siècles après les ermites de saint Augustin, à la fin du XVIe siècle, la famille augustinienne voit naître deux nouveaux ordres mendiants : les augustins récollets, fondé à Tolède, et les augustins déchaux (ou « déchaussés »), en France et en Italie, et ont pour habitude de marcher pieds nus. Suivront, au XIXe siècle, une myriade de congrégations augustiniennes parmi lesquelles les augustins de l’Assomption, aussi appelés « assomptionnistes ». En 1870, ils fondent le groupe de presse Bayard, qui éditeLa Croix.

Sud global

L’ordre de saint Augustin (OSA) compte aujourd’hui environ 3 000 membres dans une cinquantaine de pays. Comme de nombreuses congrégations, son centre de gravité s’est peu à peu déplacé de la vieille Europe vers le Sud global.« Aux Pays-Bas, notamment, plusieurs maisons ont fermé ces dernières années, il y a eu des difficultés de vocations », raconte frère Jean Bosco. En Europe, la congrégation n’est plus guère implantée qu’en Allemagne, en Italie et en Espagne. En France, elle n’a jamais vraiment repris pied après sa suppression lors de la Révolution.

« Les augustins sont également moins nombreux qu’auparavant aux États-Unis et aux Canada, complète le père Benoît Grière. En revanche, ils sont plus dynamiques en Amérique du Sud, en Asie (notamment aux Philippines), en Australie et en Afrique (Kenya, Tanzanie, Nigeria, République démocratique du Congo, etc.). »

« Je suis un fils de saint Augustin, un augustinien », a affirmé le nouveau pape dès sa première apparition au balcon, jeudi 8 mai au soir, citant immédiatement son maître spirituel : « Avec vous, je suis chrétien et pour vous, je suis évêque. » Benoît XVI, déjà, se réclamait de saint Augustin. Il le considérait comme « le plus grand converti de l’histoire de l’Église ».

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Publié le 25 mai 2025