Loi de bioéthique : l’Église catholique appelle à quatre journées de jeûne et de prière
Les faits
Alors que le projet de loi de bioéthique revient au Sénat le 2 février en deuxième lecture, les évêques de France proposent quatre journées de jeûne et prière pour « sortir de l’aveuglement ».
Face au bouleversement anthropologique induit par certaines dispositions de la loi bioéthique, les évêques de France invitent les catholiques au jeûne et à la prière durant les quatre prochains vendredis, les 15, 22, 29 janvier et 5 février. Ils mettent à la disposition du public un dossier intitulé « Que nos yeux s’ouvrent », comme support pour accompagner cette proposition spirituelle et expliquer la position de l’Église catholique sur ces enjeux de bioéthique.
Le projet du gouvernement
La loi du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique prévoit une révision de la loi par le Parlement dans un délai maximal de sept ans, précédé de l’organisation d’états généraux confiée au Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé. Ce texte est l’aboutissement de cette clause de révision.
La procréation médicale assistée (PMA)
Le projet de loi élargit l’accès à la procréation médicalement assistée (PMA) aux couples de femme et aux femmes célibataires. Actuellement, la PMA est uniquement accessible aux couples hétérosexuels sur indication médicale.
Le remboursement par l’assurance maladie de la PMA est ouvert à tous : couples hétérosexuels, homosexuels et femmes seules. Afin de répondre aux situations de double infertilité dans les couples, le recours à un double don de gamètes (ovocyte et sperme) au cours d’une même tentative de PMA est permis.
Les droits des enfants nés d’une PMA sont reconnus et sécurisés. Un nouveau droit d’accès aux origines est posé. Les enfants conçus par PMA peuvent à leur majorité accéder à des données non identifiantes du donneur (âge, caractères physiques…) ou à l’identité du donneur. Tout donneur devra consentir à la communication de ces données avant de procéder au don. Un nouveau mode de filiation est mis en place pour les enfants nés par PMA de couples de femmes. Les femmes concernées doivent établir devant notaire une reconnaissance conjointe de l’enfant avant sa naissance.
L’autoconservation des gamètes, en dehors de tout motif médical, devient possible pour les femmes et pour les hommes afin qu’ils puissent plus tard recourir personnellement à une PMA. Jusqu’ici une femme ne pouvait avoir recours à la congélation de ses propres ovocytes, sauf nécessité médicale. La réforme est encadrée : des bornes d’âge seront posées par décret, l’activité est réservée aux établissements publics et privés à but non lucratif autorisés, dans le cadre du service public hospitalier. Les actes liés au recueil ou au prélèvement des gamètes sont remboursés mais pas le coût de la conservation. Le recueil du consentement du conjoint du donneur de gamètes est supprimé.
Les dons d’organes, la transmission des informations génétiques
Dans le but d’améliorer l’accès à la greffe, le don croisé d’organes prélevés sur personnes vivantes est facilité. Les possibilités de dons de moelle osseuse de la part d’un mineur ou d’un majeur protégé au profit de ses père et mère sont élargies.
L’accès de la famille à des informations résultant d’un examen des caractéristiques génétiques d’une personne hors d’état d’exprimer sa volonté ou décédée est accru. Il s’agit de permettre aux proches de bénéficier de mesures de prévention ou de soins.
L’accompagnement des nouveaux progrès scientifiques
Les traitements de données issus de l’intelligence artificielle (IA), lorsqu’ils sont utilisés pour des actes de soins, sont encadrés. La personne doit être informée de l’utilisation d’un tel traitement algorithmique. L’intervention d’un professionnel de santé pour le paramétrage d’un tel traitement est obligatoire.
Les finalités de recours aux techniques d’enregistrement de l’activité cérébrale sont précisées. L’emploi de l’imagerie cérébrale fonctionnelle dans le domaine de l’expertise judiciaire est interdit.
Un décret du ministère de la santé, pris après avis de la Haute autorité de santé, peut interdire les dispositifs de neuro-modulation (qui ont pour objet de modifier l’activité cérébrale) qui présenteraient un danger grave pour la santé humaine.
La recherche sur les cellules souches
Le projet de loi ne modifie pas le régime applicable aux recherches conduites sur l’embryon. En revanche, il assouplit le régime de recherches sur les cellules souches embryonnaires (cellules prélevées dans un embryon à son tout premier stade de développement et qui peuvent se transformer en tous types de cellules – peau, muscles, coeur…). Ces recherches passent d’un régime d’autorisation par l’Agence de la biomédecine à un simple régime de déclaration préalable. Par ailleurs, une durée limite de 14 jours est fixée pour la culture in vitro des embryons humains inclus dans un protocole de recherche (embryons surnuméraires provenant d’un couple n’ayant plus de projet parental et ayant consenti à les proposer à la recherche).
Certaines dispositions régissant les modifications pouvant être apportées au génome d’embryons sont revues. L’interdiction fondamentale de toute expérience visant la transformation des caractères génétiques dans le but de modifier la descendance est maintenue. L’interdiction de modifier un embryon humain par adjonction de cellules issues d’autres espèces est clarifiée.
Les autres dispositions
Elles poursuivent l’amélioration de la qualité et de la sécurité des pratiques concernées par le champ bioéthique et optimisent l’organisation des soins.
L’information de la femme enceinte, quand il est recouru à de nouvelles techniques de génétique pour explorer un risque avéré de pathologie fœtale, est renforcée. Le délai de réflexion d’une semaine en cas d’interruption médicale de grossesse (IMG) est supprimé. Le texte crée une nouvelle catégorie d’avortement, l’interruption volontaire partielle d’une grossesse multiple en cas de mise en péril de la santé de la femme, des embryons et des fœtus. Cette intervention doit avoir lieu avant la fin de la 12e semaine de grossesse après consultation d’une équipe pluridisciplinaire.
Le projet de loi contient enfin plusieurs mesures sur la gouvernance bioéthique. Il élargit le périmètre du Comité consultatif national d’éthique aux questions et problèmes de santé résultant de progrès scientifiques et technologiques dans les domaines de l’intelligence artificielle et de l’environnement. Il favorise un débat démocratique bioéthique permanent au sein de la société. Il simplifie les missions et la gouvernance de l’Agence de la biomédecine.
Comme dans les précédentes lois de bioéthique, la clause de réexamen périodique de la loi dans un délai de sept ans est renouvelée.
Textes et documents Catholiques sur la bioéthique
Encycliques, instructions et discours
- Discours du pape François aux participants à l’assemblée générale de l’Académie Pontificale pour la Vie, le 25 juin 2018
- Discours du Saint-Père aux participants à l’assemblée générale de l’Académie Pontificale pour la Vie, le 13 février 2010
- Instruction Dignitas personae, (dignité de la personne) sur certaines questions de bioéthique, 12 Décembre 2008, Congrégation pour la doctrine de la foi
- Evangelium Vitae (l’Évangile de la vie) du 25 mars 1995 sur la valeur et l’inviolabilité de la vie
- Veritatis splendor (la splendeur de la vérité) du 6 août 1993, sur la morale catholique
- Instruction Donum vitae (le don de la vie) du 22 février 1987 : peut-on intervenir dans la phase initiale de la vie et de l’être humain et dans les processus mêmes de la procréation ?, Congrégation pour la doctrine de la foi
Textes et documents
- Dans une Déclaration signée par tous les évêques de France : « La dignité de la procréation » (coédition, Cerf, Bayard, Mame), l’Église catholique rappelle la valeur de la procréation : acte profondément et spécifiquement humain dont la manipulation entamerait gravement la valeur de fraternité qui fonde le pacte social en notre société.
- Fiches « bioéthique » du groupe de travail « Eglise et bioéthique », 2018
- Réflexion sur la fin de la vie : une lettre de Mgr Brouwet, octobre 2013
- « Pardon, je suis une personne » par Mgr d’Ornellas, tribune publiée dans le Figaro, 12 avril 2011
- Dignité et vulnérabilité au cœur du débat éthique– Documents Episcopat n°6 de juin 2010, conférence des évêques de France
- « Bioéthique: élaborons une écologie humaine. La morale doit primer sur la raison technique », Mgr Pierre D’Ornellas, Le Monde, 6 avril 2011
- Entendre l’appel de la dignité,billet de Mgr Pierre d’Ornellas Archevêque de Rennes, Dol et Saint-Malo, jeudi 04 novembre 2010
- « Bioéthique, questions pour un discernement », Mgr Pierre d’Ornellas et les évêques du groupe de travail sur la bioéthique, Lethielleux/ DDB, Décembre 2009
- Catéchèse du cardinal André Vingt-Trois sur le don de la vie, mai 2009
- « Bioethique, propos pour un dialogue », Mgr Pierre d’Ornellas et les évêques du groupe de travail sur la bioéthique, Lethielleux/ DDB, Février 2009
- Discours de clôture de l’Assemblée plénière, Cardinal André Vingt-Trois, avril 2008
- un enjeu d’humanité